Zygmunt Bauman “Soif de paix”

Zygmunt Bauman “Soif de paix”

« […] Toutes les étapes et les phases de l’histoire de l’humanité avaient un dénominateur commun : elles étaient caractérisées d’un côté par l’inclusion, de l’autre par l’exclusion.

Il s’effectuait une identification réciproque, à travers l’inclusion et l’exclusion. Le ‘’nous’’ pouvait se mesurer avec l’hostilité réciproque. Le sens du ‘’nous’’ était que nous ne sommes pas eux. Et le sens du ‘’eux’’ était qu’ils ne sont pas nous. Les uns avaient besoin des autres pour exister comme entité reliée l’une à l’autre et pour pouvoir s’identifier dans un lieu ou un groupe d’appartenance. Il en a été ainsi pendant toute l’histoire de l’humanité. Ce qui a causé de grandes effusions de sang. Une forme d’auto-identification qui naît de l’identification de quelque chose d’autre en ce qui concerne le prochain.

Nous nous trouvons aujourd’hui face à la nécessité inéluctable de la prochaine étape de cette histoire, dans laquelle nous sommes en train d’élargir la notion d’humanité. En parlant d’identité de soi, nous avons un concept de ce que nous incluons dans cette idée d’humanité mise ensemble.

Je dirais que nous nous trouvons devant un pas supplémentaire à accomplir qui demande l’abolition du pronom ‘’eux’’. Jusqu’à ce jour, nos ancêtres avaient quelque chose en commun : un ennemi. Maintenant, face à la perspective d’une humanité globale, où le trouvons-nous, cet ennemi ?

Nous nous trouvons dans une réalité cosmopolite et donc tout ce qui est fait, même dans le coin le plus reculé du monde, a un impact sur le reste de notre planète et sur les perspectives d’avenir. Nous sommes tous dépendants les uns des autres et on ne peut pas revenir en arrière. […] »

Zygmunt Bauman, sociologue et philosophe, 18-09-2016, Assise (Italie), à l’Assemblée d’ouverture de la rencontre « Soif de paix ».

 

 

 

Sergio Mattarella et l’Europe des jeunes

Sergio Mattarella et l’Europe des jeunes

« […] Je voudrais maintenant m’adresser surtout aux jeunes.

Je sais bien que votre dignité est aussi liée au travail. Et je sais bien qu’aujourd’hui, dans notre pays, si pour les adultes le travail est insuffisant, souvent précaire et parfois sous-payé, il l’est encore davantage pour vous. Votre génération est plus instruite que toutes celles qui vous ont précédé. Vous avez des connaissances et de grandes potentialités. La possibilité d’être acteurs de la vie sociale doit vous être assurée.

Beaucoup d’entre vous étudient ou travaillent dans d’autres pays d’Europe. C’est souvent une grande opportunité, mais ce doit être un choix libre. Si on est contraint de quitter l’Italie par manque de travail, on se trouve face à une pathologie qui a besoin qu’on y porte remède.

Les jeunes qui décident de le faire méritent toujours respect et soutien.

Et quand on ne peut pas ramener dans le pays l’expérience mûrie à l’étranger, c’est toute la société qui est appauvrie.

En février dernier, dans une université de New York, j’ai rencontré des étudiants de tous les continents. Une jeune a commencé son intervention en disant qu’elle se sentait citoyenne européenne, en plus d’être italienne.

De nombreuses expériences de jeunes qui partagent des valeurs, des idées, une culture, avec d’autres jeunes Européens disent à l’évidence que l’Europe n’est pas simplement le produit de quelques traités. Elle est un continent qui, après avoir été pendant des siècles divisé par des guerres et des inimitiés, a choisi un chemin de paix et de développement commun.

Ces jeunes comprennent qu’il vaut mieux affronter ensemble les choix à faire pour notre temps. Ils comprennent encore mieux la valeur de l’intégration européenne pacifique face à la tragédie des enfants d’Alep, aux milliers de personnes noyées en Méditerranée et à toutes les guerres qui se déroulent dans le monde. Ils n’acceptent pas que l’Europe, en se contredisant, se montre divisée et inerte, comme c’est le cas avec l’immigration.

De l’Union européenne, nous attendons des gestes de solidarité concrète sur les problèmes de la répartition des réfugiés et de la gestion respectueuse de la dignité des personnes pour le rapatriement de ceux qui n’obtiennent pas le droit d’asile. […] »

Sergio Matarella, président de la République italienne, discours à la Nation, 31-12-2016

 

 

Nouveaux horizons après l’événement de Lund (Suède)

Nouveaux horizons après l’événement de Lund (Suède)

Un anniversaire en communion

« C’est pour moi une grande joie d’être ici aujourd’hui, à rendre témoignage de l’œuvre de l’Esprit Saint qui sème l’unité parmi des disciples de Jésus.

L’Esprit Saint, selon les paroles de Martin Luther : ‘’appelle toute la chrétienté sur la terre, la rassemble, l’éclaire, la sanctifie et la maintient en Jésus-Christ, dans l’unique vraie foi’’.

Aujourd’hui, à Lund et à Malmö, nous expérimentons le miracle moderne de l’Esprit Saint, comme les disciples en ont fait l’expérience dans ma ville natale de Jérusalem, il y a deux mille ans. Aujourd’hui, tandis que nous nous réunissons pour exprimer notre espérance d’unité, nous nous rappelons la prière sacerdotale du Christ : « que tous soient un […], afin que le monde croie que tu m’as envoyé » (Jn 17,21). Remercions le Dieu Un et Trine parce que nous sommes en train de passer du conflit à la communion. La rencontre historique d’aujourd’hui envoie au monde entier ce message : les engagements religieux poursuivis avec force peuvent amener à une réconciliation pacifique au lieu d’apporter davantage encore de conflits dans notre monde déjà tourmenté. Quand des membres d’une religion travaillent à l’unité et à la réconciliation, la religion peut promouvoir la prospérité de toutes les communautés humaines. […] »

Extrait du discours de l’évêque Munib Younan, président de la Fédération luthérienne mondiale, Lund (Suède), 31-10-2016

 

Un anniversaire en communion – Commémoration du 500e anniversaire de la Réforme

Dans un article paru dans l’Osservatore Romano (17/01/2017), le cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, explique le sens de la commémoration commune entre catholiques et luthériens du cinquième centenaire de la Réforme.

Le cardinal Koch rappelle la prière œcuménique du pape François à Lund (Suède), le 31 octobre 2016, avec l’évêque Munib Younan, président de la Fédération mondiale luthérienne (LWB), à l’occasion de la commémoration de la Réforme. La prière historique « n’a pas toujours été accueillie avec gratitude, elle a aussi rencontré critiques et oppositions. Du côté catholique, on a craint une dérive protestante du catholicisme. Du côté protestant, on a parlé de trahison de la Réforme ». Au lieu de cela – fait observer le cardinal Koch – la commémoration de cet anniversaire « se présente aux deux parties comme une invitation bienveillante à dialoguer sur ce que les catholiques peuvent apprendre de la Réforme et sur ce que les protestants peuvent tirer de l’Église catholique comme enrichissement pour leur propre foi », en dépassant toute partialité et polémique.

Martin Luther « ne voulait absolument pas la rupture avec l’Église catholique ni la fondation d’une nouvelle Église, mais il avait à l’esprit le renouveau de la chrétienté tout entière dans l’esprit de l’Évangile. […] Le fait qu’à ce moment-là son idée de réforme n’ait pas pu se réaliser est dû pour une bonne part à des facteurs politiques ».

La commémoration de 2017 – souligne encore le cardinal – doit donc être comprise « comme une invitation à revenir à la préoccupation originelle de Luther » à la lumière de trois concepts-clefs : la gratitude pour les 50 années d’intense dialogue entre catholiques et luthériens, un repentir public accompagné d’une purification de la mémoire historique, et l’espérance qu’une commémoration commune de la Réforme puisse permettre « d’accomplir de nouveaux pas vers une communion ecclésiale engageante. Cette dernière doit demeurer l’objectif de tout  effort œcuménique et c’est donc aussi précisément ce que doit viser la commémoration de la Réforme. Après 500 ans de division, après avoir vécu pendant une longue période en mode opposé ou parallèle, nous devons apprendre à vivre les uns avec les autres en étant liés plus solidement, et nous avons à le faire déjà aujourd’hui ».

( résumé de Beatriz Lauenroth )

Le rêve de pape François

Le rêve de pape François

A l’occasion de la remise du prix Charlemagne, à Rome, le 6 mai 2016, le pape François a fait part de son rêve pour l’Europe

(…) Avec l’esprit et avec le cœur, avec espérance et sans vaine nostalgie, comme un fils qui retrouve dans la mère Europe ses racines de vie et de foi, je rêve d’un nouvel humanisme européen, d’« un chemin constant d’humanisation », requérant « la mémoire, du courage, une utopie saine et humaine ».

Je rêve d’une Europe jeune, capable d’être encore mère : une mère qui ait de la vie, parce qu’elle respecte la vie et offre l’espérance de vie.

Je rêve d’une Europe qui prend soin de l’enfant, qui secourt comme un frère le pauvre et celui qui arrive en recherche d’accueil parce qu’il n’a plus rien et demande un refuge.

Je rêve d’une Europe qui écoute et valorise les personnes malades et âgées, pour qu’elles ne soient pas réduites à des objets de rejet improductifs.

Je rêve d’une Europe où être migrant ne soit pas un délit mais plutôt une invitation à un plus grand engagement dans la dignité de l’être humain tout entier.

Je rêve d’une Europe où les jeunes respirent l’air pur de l’honnêteté, aiment la beauté de la culture et d’une vie simple, non polluée par les besoins infinis du consumérisme ; où se marier et avoir des enfants sont une responsabilité et une grande joie, non un problème du fait du manque d’un travail suffisamment stable.

Je rêve d’une Europe des familles, avec des politiques vraiment effectives, centrées sur les visages plus que sur les chiffres, sur les naissances d’enfants plus que sur l’augmentation des biens.

Je rêve d’une Europe qui promeut et défend les droits de chacun, sans oublier les devoirs envers tous.

Je rêve d’une Europe dont on ne puisse pas dire que son engagement pour les droits humains a été sa dernière utopie. Merci.

Remise du prix Charlemagne, extrait du discours du pape François, Rome, Salle Royale, Vendredi 6 mai 2016

Pour lire le texte intégral : http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/speeches/2016/may/documents/papa-francesco_20160506_premio-carlo-magno.html

 

Le Message de Munich 2016

Le Message de Munich 2016

Ensemble pour l’Europe. Rencontre. Réconciliation. Avenir.
Munich le 2/7/2016 

Il n’y a pas d’alternative au vivre ensemble

« Unis dans la diversité ». Cet espoir européen est aujourd’hui plus actuel que jamais. L’Europe ne doit pas devenir une « forteresse » et ériger de nouvelles frontières. Il n’y a pas d’alternative au vivre ensemble. Une vie ensemble dans la diversité réconciliée est possible.

L’Évangile – une source d’espoir

Jésus-Christ a prié pour l’unité et il a donné sa vie pour cela. C’est l’Évangile qui nous le dit ; depuis 2000 ans, il est une force créative pour la culture en Europe. Jésus-Christ nous enseigne l’amour sans limite pour tous les hommes. Il nous montre le chemin de la miséricorde et de la réconciliation : nous pouvons demander pardon et nous pardonner les uns aux autres. L’Évangile est une puissante source dans laquelle nous pouvons puiser de l’espoir pour l’avenir.

L’Europe – une culture du respect et de l’estime

Les terribles expériences des guerres mondiales nous ont enseigné que la paix est un don précieux que nous devons préserver. Notre avenir sera façonné par une culture du respect et de l’estime de l’autre, y compris de l’étranger.

L’unité est possible – surmonter les divisions

Nous demandons à tous les chrétiens, en particulier aux responsables des Églises, de surmonter les divisions. Les divisions ont provoqué la souffrance, la violence, l’injustice et miné la crédibilité de l’Évangile. En tant que chrétiens, nous voulons vivre ensemble dans la réconciliation et en pleine communion.

Notre engagement

  • Nous vivons avec l’Évangile de Jésus-Christ et nous le témoignons en paroles et en actes.
  • Nous suivons la voie de la réconciliation et nous aidons nos communautés, Églises, peuples et cultures, qu’ils puissent vivre « unis dans la diversité ».
  • Nous rencontrons les personnes qui ont d’autres religions et d’autres convictions avec respect et nous recherchons avec elles un dialogue ouvert.
  • Nous nous engageons à faire grandir la bienveillance et la paix dans le monde.
  • Nous avons la vision d’un vivre ensemble en Europe, qui est plus fort que toute peur et tout égoïsme.
  • Nous faisons confiance à l’Esprit Saint, qui renouvelle et vivifie sans cesse le monde.